Les Courants de Foucault sont des courants électriques circulaires qui apparaissent naturellement dans les matériaux conducteurs en réponse aux variations du flux magnétique, créant leurs propres champs magnétiques opposés.
Cette technique repose sur le principe de l’induction électromagnétique.
C’est la même physique qui recharge sans fil votre brosse à dents électrique ou votre iPhone, mais détournée pour traquer des défauts structurels avec une précision remarquable.
Cette méthode est largement utilisée dans le Contrôle non destructif (CND).
Le concept est complexe. Nous utilisons une bobine pour induire de minuscules courants circulaires dans des matériaux conducteurs.
Si ces courants s’écoulent sans perturbation, la pièce est bonne. Mais s’ils rencontrent quelque chose, comme une fissure ou une cavité, l’écoulement change, et l’instrument nous alerte instantanément.
Pourquoi est-ce important ?
Dans des secteurs à forts enjeux comme l’aéronautique et les pipelines de pétrole et de gaz, un défaut invisible à l’œil humain peut avoir des conséquences catastrophiques.
Nous avons besoin d’un moyen de “voir” ces défauts sans altérer la pièce. Le contrôle par courants de Foucault nous offre cette visibilité, permettant une détection rapide des fissures de surface et des capacités de tri de matériaux que d’autres méthodes ne peuvent tout simplement pas égaler.
Dans cet article, je veux vous aider à construire un modèle mental solide de la façon dont cela fonctionne réellement.
Nous allons soulever le capot de la physique, explorer l’équipement et comprendre exactement pourquoi cette méthode est si efficace pour vérifier la qualité. Nous examinerons tout, du comportement des champs magnétiques aux types de sondes utilisés sur le terrain.
Allons-y.
Sommaire
Que sont les courants de Foucault ?
Quand nous parlons de contrôle non destructif, nous utilisons souvent des outils magiques sans nous interroger sur la physique qui les alimente. Vous passez une sonde au-dessus d’une pièce, et soudain vous savez s’il y a une minuscule fissure cachée en dessous.
Mais que se passe-t-il réellement à l’intérieur de ce métal ? Tout se résume aux courants de Foucault.
Le nom nous donne un indice majeur sur le fonctionnement. Pensez à une rivière qui s’écoule vers l’aval. Si vous plantez une pagaie dans l’eau, le courant tourbillonne autour de l’obstacle selon des motifs circulaires.
En dynamique des fluides, ces tourbillons sont appelés “eddies” (tourbillons).
Dans notre monde de la métrologie, la “rivière” est un matériau conducteur (comme l’aluminium ou le cuivre), et la “pagaie” est un champ magnétique variable.
Lorsque ce champ atteint le conducteur, il pousse les électrons dans des boucles fermées et circulaires de courant électrique.
Ce sont vos courants de Foucault.
Ces courants ne se contentent pas de tourner. Ils créent leur propre champ magnétique.
Ce nouveau champ s’oppose au champ d’origine qui l’a créé. Ce comportement est connu sous le nom de loi de Lenz.
C’est ce “tiraillement” entre les deux champs magnétiques qui nous permet de détecter les défauts.
Si une fissure perturbe l’écoulement du courant, la contre-réaction change, et notre instrument détecte la différence.
Pour que cela fonctionne, il faut exactement deux ingrédients. D’abord, le matériau doit être électriquement conducteur.
Ensuite, le champ magnétique doit varier dans le temps, c’est pourquoi nous utilisons généralement le courant alternatif dans nos sondes d’inspection.
Principe de l’induction électromagnétique
Si vous avez déjà tenu une sonde au-dessus d’une pièce métallique et regardé le signal danser à l’écran, cela peut sembler un peu magique.
Vous ne touchez pas la surface, et pourtant vous savez exactement ce qui se passe à l’intérieur.
C’est le principe de l’induction électromagnétique à l’œuvre. C’est le moteur physique qui fait fonctionner tout le processus d’inspection.
Lorsque vous approchez un champ magnétique variable (comme celui de votre sonde) d’un conducteur, ces lignes magnétiques invisibles “coupent” le matériau.
Ce changement crée une force électromotrice, ou FEM.
Pensez à la FEM non pas comme à un objet solide mais plutôt comme à une pression électrique. Elle pousse les électrons libres dans le métal, les forçant à se déplacer.
L’amplitude de cette poussée dépend fortement de la résistivité du conducteur et de la perméabilité magnétique.
Si le matériau est très conducteur, les électrons circulent facilement. S’il est résistif, ils peinent, générant de la chaleur plutôt que des courants intenses.
La force de Lorentz
Faisons un zoom au niveau atomique une seconde.
La force qui guide réellement ces électrons s’appelle la force de Lorentz.
Lorsque le champ magnétique de votre sonde balaye le matériau, il pousse physiquement les porteurs de charge (électrons).
En raison de la physique définie par la règle de la main droite, cette force agit perpendiculairement aux lignes de champ magnétique.
Au lieu de s’écouler en ligne droite, les électrons sont poussés dans des trajectoires circulaires. Ces boucles tourbillonnantes de courant ressemblent beaucoup aux remous d’une rivière, d’où le nom.
Inductance mutuelle et auto-inductance
Pour bien comprendre le comportement de la sonde, il faut distinguer deux types d’inductance.
D’abord, il y a l’auto-inductance.
C’est la résistance de la bobine aux variations de son propre courant. Lorsque vous faites passer un courant alternatif dans la bobine, elle crée une FEM inverse qui s’oppose à l’écoulement du courant.
C’est ce qui fixe l’impédance de base de la sonde dans l’air.
Ensuite, il y a l’inductance mutuelle.
C’est la relation entre la sonde et la pièce testée.
Lorsque le champ magnétique de la sonde traverse la pièce, il induit des courants de Foucault. Ces courants, à leur tour, génèrent leur propre champ magnétique qui recoupe la bobine de la sonde.
Cet échange mutuel d’énergie est la façon dont la pièce “répond” à l’instrument. L’intensité de cette inductance mutuelle dépend de la proximité de la sonde avec la pièce (couplage) et des propriétés du matériau.
Cette interaction est ce que nous mesurons réellement. Si un défaut comme une fissure interrompt ces boucles de courant, le champ secondaire s’affaiblit, l’équilibre se déplace et votre instrument vous alerte du problème.
Rappelez-vous que cette opposition est instantanée. Au moment où le flux magnétique change, le matériau réagit, ce qui rend cette méthode incroyablement rapide pour balayer de grandes surfaces.
Comment fonctionne l’inspection par courants de Foucault
Imaginez que vous tenez une pièce métallique d’aéronef. Elle semble parfaite à l’œil nu, mais nous devons savoir s’il y a de minuscules fractures invisibles, juste sous la surface.
Le processus se déroule en quelques étapes distinctes :
D’abord, nous envoyons un courant alternatif dans la bobine de la sonde.
Lorsque nous approchons cette bobine d’un matériau conducteur, le champ magnétique force les électrons de la pièce à se déplacer.
Ces courants de Foucault créent leur propre champ magnétique qui s’oppose au champ de la sonde. La sonde “ressent” effectivement cette opposition.
Si les courants rencontrent un défaut, ils sont contraints de contourner l’obstacle.
C’est exactement comme de l’eau qui s’écoule autour d’un rocher dans un ruisseau. Cette perturbation affaiblit le champ magnétique secondaire, et l’instrument signale instantanément le changement.
Le plan d’impédance
Si vous avez déjà regardé l’écran d’un instrument de courants de Foucault, vous avez probablement vu un “point volant” se déplacer sur une grille.
C’est le plan d’impédance, et c’est l’outil de visualisation le plus important dont nous disposons.
Il cartographie deux variables simultanément : la résistance (R) sur l’axe horizontal et la réactance inductive (XL) sur l’axe vertical.
Quand la sonde est dans l’air, le point se trouve à un endroit spécifique (réactance élevée, faible résistance). Lorsque vous l’approchez d’une pièce conductrice, le point trace une courbe communément appelée courbe de lift-off.
Une fois que la sonde se pose sur la surface, ce point devient votre “nul” ou point zéro.
Quand la sonde rencontre un défaut, le point s’éloigne de ce point nul. Mais voici la partie essentielle : la direction compte :
- Une fissure de surface peut faire monter le point vers la droite.
- Un changement de conductivité peut le faire se déplacer horizontalement.
- La corrosion peut l’envoyer dans une direction complètement différente.
Cet angle de déplacement s’appelle l’angle de phase.
En analysant l’angle de phase, un opérateur peut vous dire quel est le défaut, pas seulement qu’il y en a un. Il peut distinguer une fissure, un décalage de conductivité, ou simplement une légère levée de la sonde par rapport à la surface.
Retard de phase du signal
Un autre aspect fascinant de l’analyse du signal est le retard de phase.
À mesure que les courants de Foucault pénètrent plus profondément dans le matériau, ils ne font pas que s’affaiblir (atténuation), ils sont aussi retardés dans le temps.
Il faut un temps fini pour que le champ magnétique se propage vers le bas et pour que le champ de réaction remonte.
Ce délai se manifeste par un déphasage sur votre écran. Plus le défaut est profond, plus le signal tourne dans le sens horaire sur le plan d’impédance.
C’est extrêmement utile car cela nous permet d’estimer la profondeur d’un défaut. Une fissure de surface peut apparaître à 0 degré, tandis qu’une fissure sous-surface à 1 mm de profondeur peut apparaître à 45 degrés.
Cela nous donne une compréhension 3D de la pièce à partir d’un écran 2D.
Profondeur de pénétration
Il y a toutefois un “piège” ici.
Les courants de Foucault sont paresseux. Ils préfèrent circuler à la surface du matériau, un phénomène connu sous le nom de l’effet de peau.
Plus on va en profondeur, plus les courants s’affaiblissent.
Dans des conditions optimales, l’inspection par courants de Foucault peut détecter des fissures de surface aussi petites que 0,5 mm, ce qui en fait un pilier des contrôles de sécurité aéronautiques.
Si vous devez regarder plus profondément dans une pièce, vous ne pouvez pas simplement augmenter la puissance. Il faut en réalité abaisser la fréquence.
Les fréquences plus basses pénètrent plus profondément mais sont moins sensibles aux très petits défauts.
Nous calculons cette profondeur spécifique (où la densité de courant chute à environ 37 % de la valeur de surface) à l’aide de cette formule :
Dans cette équation, f est la fréquence, μ la perméabilité magnétique, et σ la conductivité.
Elle souligne pourquoi il est si important de comprendre les propriétés de votre matériau avant même d’allumer la machine.
Différents types de sondes
Choisir la bonne sonde est la décision la plus importante que vous prendrez lors de la préparation d’une inspection.
Il est tentant de penser qu’une sonde n’est qu’une bobine de fil, mais la géométrie spécifique de cette bobine change complètement le comportement physique.
J’aime comparer le champ magnétique à un faisceau de lampe.
Si vous voulez inspecter une minuscule fissure dans un alésage de boulon, vous avez besoin d’un faisceau laser focalisé.
Si vous voulez vérifier un long tuyau pour un amincissement général de paroi, vous avez besoin d’un large projecteur. Nous classons les types de sondes en fonction de la façon dont elles façonnent ce champ d’énergie et, en partie, de la façon dont elles “écoutent” l’écho.
Explorons nos options.
Sondes de surface
Ce sont vos outils du quotidien pour les éléments plats ou les pièces légèrement courbes.
Nous les divisons généralement en deux sous-catégories selon la façon dont elles traitent le signal.
D’abord, vous avez les sondes absolues. Elles utilisent une seule bobine de mesure pour évaluer l’impédance totale du matériau situé en dessous.
Elles sont excellentes pour détecter des changements graduels, comme des décalages de conductivité ou des variations d’épaisseur de revêtement. Cependant, elles sont sensibles aux variations de température.
Ensuite, vous avez les sondes différentielles. Ce sont les véritables chasseuses de défauts.
Elles contiennent deux bobines qui comparent en permanence le matériau en deux points espacés (ou parfois focalisées sur un seul point).
Si le matériau est identique sous les deux bobines, le signal est nul. Mais si une bobine passe sur une fissure tandis que l’autre voit du métal sain ? Vous obtenez un “pic” de signal net et distinct.
Parce qu’elles sont auto-référencées, elles annulent les changements graduels comme la température ou la conductivité, ce qui les rend beaucoup plus silencieuses et plus sensibles aux fissures.
Conceptions de sondes avancées
Au-delà des bases, les ingénieurs ont développé des conceptions astucieuses pour résoudre des problèmes spécifiques. Les sondes en réflexion (ou sondes Driver/Pickup) séparent les rôles :
- Une bobine génère le champ (Driver)
- Une autre écoute la réponse (Pickup).
Ce découplage permet des plages de fréquences beaucoup plus larges et de meilleurs rapports signal/bruit.
Nous avons aussi des sondes blindées.
Les bobines standard ont un champ magnétique qui se propage comme un tore.
Si vous essayez d’inspecter près d’une tête de boulon ou d’une arête, ce champ qui s’étale heurte la géométrie et crée du bruit.
Les sondes blindées utilisent un anneau de ferrite ou un autre matériau d’écran pour focaliser le champ magnétique vers le bas, en le gardant concentré et en l’empêchant de “voir” des choses que vous ne voulez pas voir.
Sondes bobine et bobines entourantes
Parfois, utiliser une sonde crayon pour balayer une pièce revient à peindre un couloir avec une brosse à dents. Lorsque vous avez une géométrie cylindrique, vous voulez de la couverture.
Les sondes bobine sont conçues pour glisser à l’intérieur d’un tube et inspecter toute la circonférence interne à la fois. C’est la norme pour contrôler les échangeurs de chaleur dans les centrales électriques, par exemple.
Elle fournit une vue complète à 360° lors du tirage.
Les bobines entourantes fonctionnent à l’inverse.
La pièce (comme un fil, une barre ou un tube) passe à travers la bobine. C’est extrêmement rapide pour les lignes de fabrication, mais il y a un piège à surveiller.
Avec les bobines entourantes, le « facteur de remplissage » (Fill Factor) est critique. Si la bobine est trop grande pour la pièce, le couplage magnétique chute rapidement et votre sensibilité aux défauts disparaît.
Courants de Foucault multi-éléments (ECA)
Si les sondes standard sont comme une seule lampe torche, l’Eddy Current Array (ECA) ressemble à un système d’éclairage de stade.
Les sondes ECA contiennent des rangées de multiples bobines disposées selon un motif spécifique. Au lieu de balayer d’avant en arrière avec une seule bobine (raster), vous pouvez couvrir une large zone en un seul passage.
Le logiciel assemble les signaux de toutes ces bobines pour créer une image C-Scan qui est essentiellement une carte codée en couleurs de la surface.
Cela vous permet de voir la forme et la longueur de la fissure à l’écran, plutôt que d’interpréter seulement un point en mouvement.
L’ECA révolutionne l’industrie car c’est plus rapide, moins dépendant de la stabilité de la main de l’opérateur, et cela fournit une trace numérique permanente de l’inspection.
Contrôle des matériaux conducteurs
Voici le principal inconvénient du contrôle par courants de Foucault : il a une liste d’invités très stricte. Cette méthode ne fonctionne que sur les matériaux qui conduisent l’électricité.
Si vous essayez d’inspecter du plastique, du verre ou de la céramique, vous n’obtiendrez absolument aucun signal.
Pour comprendre pourquoi, nous devons regarder ce qui se passe au niveau atomique.
Pour que des courants de Foucault se forment, il faut des électrons libres de se déplacer lorsque le champ magnétique apparaît. Dans les métaux conducteurs, ces électrons libres dérivent facilement dans les boucles circulaires souhaitées.
Dans les isolants, les électrons sont bloqués. Pas d’écoulement, pas de courants de Foucault.
C’est pourquoi cette méthode est l’outil de référence pour l’aluminium, le cuivre, le titane, les aciers alliés et les alliages de nickel. C’est une pratique standard en aéronautique et en fabrication pour vérifier tout, des peaux de fuselage aux aubes de turbine.
Si vous fabriquez des produits en matériaux non conducteurs, il vous faut une autre solution.
Normes de conductivité IACS
Nous mesurons la conductivité à l’aide de l’échelle IACS (International Annealed Copper Standard). Le cuivre recuit pur est défini à 100 % IACS.
Les alliages d’aluminium peuvent varier de 30 % à 50 % IACS, tandis que le titane est bien plus bas, autour de 1,5 % à 3,5 % IACS (Ti-6Al-4V ~2,3 %).
Pourquoi est-ce important ?
Parce que la conductivité change avec les propriétés du matériau. Si une pièce en aluminium a été traitée thermiquement de façon incorrecte, sa conductivité va évoluer.
Si un matériau est sollicité ou fatigué, sa conductivité peut changer.
Nous pouvons utiliser les instruments à courants de Foucault non seulement pour trouver des fissures, mais aussi pour vérifier que le métal est dans le bon état métallurgique.
Ferromagnétique vs non ferromagnétique
Tester des matériaux non ferromagnétiques comme l’aluminium ou le cuivre est généralement la voie la plus simple en inspection par courants de Foucault.
Ils n’ont pas de fortes propriétés magnétiques, donc le champ de la sonde les traverse de manière prévisible.
Le signal obtenu est propre et plus facile à interpréter.
Les matériaux ferromagnétiques comme l’acier carbone sont un peu plus particuliers. Ils ont une perméabilité magnétique élevée, ce qui signifie qu’ils absorbent très fortement le flux magnétique.
Le problème ?
Cette perméabilité varie fortement à la surface de la pièce, créant un bruit de fond qui peut masquer les signaux des fissures réelles.
Pour résoudre le problème de bruit dans l’acier, nous utilisons souvent la saturation magnétique.
Nous appliquons un fort champ magnétique continu (DC) à la pièce, saturant en quelque sorte sa capacité magnétique jusqu’à ce qu’elle se comporte davantage comme un matériau non ferromagnétique. C’est une astuce ingénieuse qui calme le bruit.
Applications concrètes
Voyons où cette technologie est réellement utilisée.
Aéronautique
Si vous avez déjà pris l’avion sur une ligne commerciale, vous avez compté sur le contrôle par courants de Foucault.
Le fuselage d’un avion est constitué de plaques d’aluminium chevauchées maintenues par des rivets. Ces joints à recouvrement sont des endroits privilégiés pour l’apparition de fissures de fatigue autour des trous de fixation à cause des cycles de pressurisation constants.
Les inspecteurs utilisent des sondes annulaires ou des sondes coulissantes spécialisées pour balayer ces rangées de rivets. Les courants de Foucault peuvent pénétrer la couche supérieure d’aluminium pour trouver des fissures initiées dans la couche inférieure, le tout sans enlever la peinture ni les rivets.
Cette capacité est essentielle pour les calendriers de maintenance des compagnies aériennes.
Centrales nucléaires
Dans une centrale nucléaire, le générateur de vapeur contient des milliers de petits tubes qui transportent de l’eau chaude et radioactive. Si l’un de ces tubes fuit, c’est un incident de sécurité majeur.
Des sondes bobine sont poussées à grande vitesse dans ces tubes pour vérifier la corrosion, les piqûres, ou l’usure par fretting due aux structures de support.
Comme les tubes sont non ferromagnétiques (généralement en Inconel), les courants de Foucault sont l’outil idéal pour ce travail.
Avantages du contrôle par courants de Foucault
Si vous avez déjà passé l’après-midi à frotter du gel de couplant collant sur une aube de turbine après un contrôle ultrasonore, vous connaissez la galère.
C’est là que le contrôle par courants de Foucault paraît un peu magique.
Le plus grand avantage ici est que c’est une méthode sans contact. Parce que le champ électromagnétique se propage librement dans l’air, vous n’avez besoin d’aucun milieu de couplage physique (comme de l’eau, du gel ou de l’huile) entre la sonde et la pièce.
Le lien est le champ magnétique lui-même.
Cela garde la pièce propre et évite complètement le rituel de pré-nettoyage qui peut ralentir d’autres méthodes de CND.
Comme il n’y a pas de frottement physique ni de traînée de fluide, les vitesses d’inspection peuvent être exceptionnellement élevées. Les lignes de production automatisées inspectent souvent des fils ou des tubes à des vitesses dépassant 20 mètres par seconde.
Il est également étonnamment sensible.
Nous ne parlons pas seulement de grosses entailles évidentes qui déclenchent un signal.
Un réglage bien calibré peut détecter des fissures débouchantes aussi fines que 0,5 mm. La sonde perçoit pratiquement l’interruption microscopique de l’écoulement des électrons, vous permettant de repérer des fissures de fatigue ou des fractures sous contrainte bien avant qu’elles ne soient visibles à l’œil nu.
Cette nature sans contact la rend idéale pour l’automatisation. Comme vous n’avez pas besoin d’assurer un couplage humide parfait, vous pouvez monter des sondes sur des bras robotisés ou faire passer des géométries complexes à travers des bobines sur mesure.
Elle gère des surfaces cachées et des formes complexes qui seraient un cauchemar à contrôler avec un transducteur de contact.
Portable et polyvalent
Je pensais autrefois que pour atteindre ce niveau de sensibilité, il fallait une énorme baie d’équipements de laboratoire. Il s’avère que ce n’est plus le cas.
Les instruments modernes sont alimentés par batterie, portatifs, et suffisamment légers pour être transportés en haut d’un échafaudage.
Il y a une autre astuce intéressante liée à l’effet de lift-off. Bien que nous essayions généralement de minimiser la distance entre la sonde et la pièce, la physique autorise un petit écart.
Cela signifie que vous pouvez inspecter des matériaux conducteurs à travers de minces revêtements non conducteurs. Vous pouvez vérifier une aile d’avion en aluminium pour détecter des fissures sans décaper la peinture au préalable.
Le champ magnétique ignore simplement la peinture et teste le métal en dessous.
Limites et défis
Nous avons beaucoup parlé de l’aspect super-pouvoir des inspections par courants de Foucault. Détecter des défauts sans enlever la peinture ni toucher la surface est incroyable.
Mais la physique est rarement aussi généreuse sans contrepartie. Il s’avère que cette méthode a des contraintes spécifiques qu’il faut comprendre avant de s’y fier.
Le plus grand obstacle est l’exigence fondamentale de contrôle des matériaux conducteurs.
Si le matériau ne laisse pas les électrons se déplacer librement (comme le plastique, le verre ou le bois), cela ne fonctionne tout simplement pas. S’il n’y a pas de courant, il n’y a pas de signal.
Cela nous limite entièrement aux métaux et aux alliages.
Même dans un métal conducteur, nous devons gérer l’effet de peau. Les courants se concentrent fortement à la surface et s’estompent de façon exponentielle en profondeur.
Cela crée une limitation en profondeur.
Si vous avez un défaut enfoui profondément dans un épais bloc d’acier, les courants de Foucault peuvent être trop faibles pour le voir lorsqu’ils atteignent cette profondeur.
Cela rend la méthode fantastique pour la détection des fissures de surface, mais moins efficace pour les défauts sous-jacents profonds par rapport aux ultrasons.
Vous devez également vous méfier de l’effet de bord.
> Le champ magnétique enveloppe la sonde comme une bulle.
Lorsque vous vous approchez du bord d’une pièce, cette bulle se déforme parce qu’une partie est dans l’air. Cela crée un signal massif qui peut facilement masquer une vraie fissure située près d’un bord.
Variables influençant les résultats
Parce que les capteurs à courants de Foucault sont très sensibles, ils captent tout ce qui modifie l’écoulement électromagnétique, pas seulement les fissures.
Cela peut rendre l’interprétation délicate car vous luttez souvent contre le “bruit” provenant de variables qui ne vous intéressent pas.
Un piège classique est le lift-off.
Cela se produit lorsque la distance entre la bobine de la sonde et la surface de la pièce varie légèrement.
Si votre main tremble et que la sonde se soulève d’une fraction de millimètre, l’impédance change drastiquement. L’instrument peut crier “Défaut !” alors qu’en réalité il s’agit simplement de “Distance”.
- Variations de conductivité : Des facteurs comme une incohérence de traitement thermique ou des changements de température peuvent modifier la conductivité du matériau, décalant votre référence.
- Perméabilité : Dans les aciers magnétiques, des variations magnétiques aléatoires peuvent noyer le signal du défaut à moins de saturer magnétiquement la pièce.
Cette sensibilité explique pourquoi la compétence de l’opérateur et les étalons de référence sont essentiels. Vous ne pouvez pas simplement allumer la machine et deviner.
Vous devez étalonner le système par rapport à une pièce saine connue et à des défauts connus (comme des encoches EDM) pour apprendre à l’instrument ce qu’il doit rechercher.
Ce n’est pas une méthode « Réussite/Échec » totalement automatisée. L’opérateur doit distinguer un signal causé par une fissure d’un signal causé par une légère inclinaison de la sonde.
Conclusion
Nous avons couvert ici une quantité énorme de notions.
C’est le principe de l’induction électromagnétique qui fait l’essentiel du travail.
Pensez-y ainsi : en créant ces boucles de courant invisibles, nous transformons la pièce testée elle-même en capteur.
Nous demandons en quelque sorte aux électrons du métal de nous informer de leur environnement.
Quand ils rencontrent un obstacle, comme une fissure ou une cavité, ils doivent contourner. Cet effort supplémentaire modifie l’impédance, et c’est le signal que nous voyons à l’écran.
Il se crée une boucle de rétroaction qui nous donne une vision non destructive.
Cette interaction est précisément ce qui rend la détection des fissures de surface si puissante.
Puisque les courants se concentrent naturellement à la surface du matériau (grâce à l’effet de peau), même la fissure la plus fine crée un obstacle majeur pour les électrons.
C’est sans doute la manière la plus sensible de réaliser un contrôle des matériaux conducteurs sans toucher la pièce ni retirer les couches de peinture protectrices.
Mais souvenez-vous, vous ne pouvez pas simplement saisir un capteur et commencer à balayer.
Choisir les bons types de sondes par courants de Foucault (savoir quand utiliser une sonde différentielle plutôt qu’une sonde absolue) est un facteur important pour obtenir des données propres.
Vous devez régler vos fréquences et vous étalonner avec un étalon de référence à chaque fois.
Si vous gérez un programme d’assurance qualité, cette capacité s’amortit d’elle-même en termes de tranquillité d’esprit.
Elle vous permet d’identifier les points de défaillance avant qu’ils ne quittent l’atelier de fabrication.
Ne vous laissez donc pas intimider par les écrans vectoriels ou les angles de phase. Une fois que vous visualisez ces courants tourbillonnants dans votre tête, le reste s’enchaîne naturellement.
Questions Fréquentes
Quel est l’objectif principal des inspections par courants de Foucault ?
Le contrôle par courants de Foucault est une méthode non destructive utilisée pour vérifier la présence de défauts dans les matériaux conducteurs sans les endommager. Elle utilise des champs électromagnétiques pour créer des courants dans la pièce testée. S’il existe une fissure ou un défaut, ceux-ci perturbent ces courants. On détecte ces perturbations pour identifier immédiatement le problème.
Quels matériaux sont compatibles avec cette méthode d’essai ?
Cette méthode ne s’applique qu’aux matériaux qui conduisent l’électricité. Exemples courants : aluminium, cuivre, acier et titane. Elle fonctionne mieux sur les matériaux non ferromagnétiques. Si vous devez tester des plastiques ou des céramiques, cette méthode ne fonctionnera pas car ils ne permettent pas l’écoulement des courants d’induction électrique.
Quels défauts spécifiques cette technologie peut-elle détecter ?
Cette méthode est excellente pour trouver des défauts de surface et sous-jacents proches de la surface. Vous pouvez détecter facilement les fissures, la corrosion, les piqûres et l’amincissement du matériau. Elle est également utile pour mesurer l’épaisseur de revêtements non conducteurs, comme la peinture, sur une base conductrice. En revanche, elle ne permet généralement pas de détecter des défauts situés en profondeur dans le matériau.
Le choix de la fréquence influe-t-il sur la profondeur de pénétration ?
Oui, la fréquence d’essai détermine directement la profondeur de pénétration des courants dans le matériau. Les basses fréquences pénètrent plus profondément, ce qui permet de voir des défauts sous-jacents. Les hautes fréquences restent proches de la surface. Il faut choisir la fréquence selon que vous devez inspecter la couche superficielle ou rechercher des problèmes structurels plus profonds.
Quelle est la différence entre les sondes absolues et différentielles ?
Une sonde absolue utilise une seule bobine pour détecter des changements généraux comme la conductivité ou l’épaisseur en comparant le matériau à une référence fixe. Une sonde différentielle utilise deux bobines pour comparer deux zones adjacentes du matériau. Cette configuration est meilleure pour trouver de petits défauts localisés comme les fissures, car elle ignore les variations graduelles des propriétés du matériau.
Que signifie le lift-off dans le contexte des inspections ?
Le lift-off décrit la variation du signal causée par la distance entre la sonde et la surface testée. Si la sonde s’éloigne légèrement de la pièce, le couplage magnétique diminue. Bien que cela puisse créer du bruit, on peut aussi utiliser cet effet intentionnellement pour mesurer l’épaisseur de revêtements non conducteurs.
Pourquoi les matériaux ferromagnétiques posent-ils des défis d’essai ?
Les matériaux ferromagnétiques comme l’acier carbone ont une forte perméabilité magnétique. Cette propriété renforce le champ magnétique mais limite la profondeur de pénétration des courants. Les propriétés magnétiques du matériau peuvent aussi varier de façon aléatoire, ce qui crée des niveaux de bruit élevés. Il faut souvent saturer magnétiquement la pièce pour lisser ces variations lors de l’inspection.
Comment le plan d’impédance aide-t-il à caractériser les défauts ?
Le plan d’impédance affiche à l’écran la résistance et la réactance de la bobine d’essai. Lorsque la sonde rencontre un défaut, la trace du signal se déplace. La direction de ce déplacement indique généralement le type de défaut, comme une fissure ou de la corrosion. La distance parcourue par le point indique en général la taille ou la gravité de l’anomalie.